L’association Reporters sans frontières a, ce jeudi 2 décembre affirmé que « les journalistes critiquant la Cour constitutionnelle pourront faire l’objet de poursuites judiciaires et de peines de prison ». C’est évident que les auteurs de ce tweet n’ont pas pris la peine de vérifier leurs sources. Burlesque pour une association de journalistes qui prétend lutter contre la diffusion de fausses nouvelles…
C’est l’arroseur arrosé. En effet, Reporters sans frontières, qui s’enorgueillit de lutter contre les fake news et caresse même le projet de labeliser des médias qu’elle considère comme « fiables » à travers le monde, ferait mieux de commencer par balayer devant sa porte.
L’association a affirmé ce jeudi 2 sur son compte Twitter que, « désormais, les journalistes critiquant la Cour constitutionnelle (au Gabon) pourront faire l’objet de poursuites judiciaires et de peines de prison ».
Et RSF, d’ajouter, sur de son fait : « si cette décision n’est pas annulée (sic !), elle constituera une remise en cause inédite de la dépénalisation des délits de presse. »
Pourtant, le poste de la Cour constitutionnelle était bien précis et disait, « Toute personne physique ou morale ou tout organe ou agent de presse auteur de menaces, d’outrages, de violences et d’attaques de quelle que nature que ce soit contre la Cour constitutionnelle ou l’un de ses membres peut être traduit devant le tribunal correctionnel suivant la procédure de flagrant délit »
Manifestement, avant de publier son tweet, RSF a omis de respecter cette règle d’or du journalisme, connu de tout étudiant qui aspire intégrer la profession, notamment la vérification des sources.
Un tour sur internet (où le texte est disponible) aurait pourtant suffi pour lui apprendre que le droit gabonais stipule tout à fait autre chose.
« Toute personne physique ou morale ou tout organe ou agent de presse auteur de menaces, d’outrages, de violences et d’attaques de quelque nature que ce soit contre la Cour constitutionnelle ou l’un de ses membres peut être traduit devant le tribunal correctionnel suivant la procédure de flagrant délit », dispose l’article 13a nouveau alinéa 2 de l’ordonnance n°010/PR/2021 modifiant et complétant la loi organique n°9/91 du 26 septembre 1991 sur la Cour constitutionnelle.
A l’inverse de ce que soutient RSF, le fait de critiquer les décisions de la Cour constitutionnelle n’est donc pas passible de poursuites judiciaires. La pénalisation ne concerne que les « menaces, d’outrages, de violences et d’attaques. »
Ainsi, une multitude de questions nous vienne à l’esprit : RSF va-t-elle retirer son tweet ? S’excuser auprès de la Cour constitutionnelle et de sa présidente pour avoir publié une fausse information constitutif d’un acte de diffamation ? Ou persister dans l’erreur ?
En attendant, chacun peut en convenir, si les journalistes ne sont pas au-dessous des lois, ils ne sont pas non plus au-dessus. N’en déplaise à RSF, le droit (d’informer) n’est pas la licence (d’insulter, de diffamer ou de menacer). Au Gabon, comme partout ailleurs dans le monde.