C’est ce lundi, que Pierre Claver Maganga-Moussavou a annoncé sa candidature, une de plus du côté de l’opposition, pour la présidentielle de 2023. Le lendemain, il a reçu une volet de bois vert de la part du Parti démocratique gabonais, plus réactif et plus offensif depuis la nomination la semaine dernière d’un nouveau secrétaire général à la tête du parti majoritaire. Notre rédaction vous explique pourquoi.
Ce mardi 15 mars, le Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir) a implicitement chargé Pierre Claver Maganga-Moussavou.
La veille, le président du Parti social démocratique (PSD) s’était permis de critiquer le président Ali Bongo Ondimba qui aurait, à l’en croire, annoncé sa candidature à l’élection présidentielle. Un fantasme partagé par les opposants et quelques médias (dont les chaines publiques françaises) qui leur sont proches. En réalité, ce qu’a dit le président le 12 mars dernier est quelque peu différent (lire notre article et voir la double-réaction ici et ici du porte-parole du chef de l’Etat…).
Fait cocasse, dans son discours, Ali Bongo Ondimba, s’il n’a pas fait officiellement acte de candidature, a en revanche pointé du doigt ceux « qui confondent leurs rêves avec la réalité ». Maganga-Moussavou est, semble-t-il, de cela.
Double frustration
Quoi qu’il en soit, mal lui en a pris. Dès le lendemain, le PDG lui a sèchement répliqué. « Certes le Gabon a fait le libre choix depuis 1990 de promouvoir le pluralisme politique démocratique, qui permet désormais à tout compatriote jouissant de ses droits civiques, de faire acte de candidature à toute élection politique. Cependant il n’en demeure pas moins que l’élection présidentielle doit rester ce rendez-vous majeur entre un homme et son peuple», a déclaré le porte-parole du PDG. «A cet égard, le PDG marque son étonnement devant les dénégations et autres critiques stériles déversées au prétexte d’une déclaration de candidature par un homme politique qui, depuis trois décennies, a été constamment associé à la gestion de l’Etat », a tonné David Ella Mintsa.
Pour le porte-parole du PDG, la sixième candidature de l’ancien vice-président à une élection présidentielle, est simplement l’expression d’une frustration consécutive à la perte de privilèges. Une référence au goût prononcé de Maganga-Moussavou pour les bolides de luxe qui lui a, en mai 2019, aux côtés de l’affaire dite du Kevazingo, coûté son poste. « Cette attitude de reniement, du reste surprenant, de la part d’une personnalité qui a occupé de de hautes fonctions au sein de l’exécutif, cache mal la frustration née de la perte de certaines positions privilégiées au sein de l’appareil étatique », a déclaré David Ella Mintsa.
Et celui d’enfoncer le clou en pointant du doigt le penchant marqué de l’intéressé pour la transhumance politique : « à travers cette énième candidature, l’intéressé voudrait-il faire oublier son implication à un très haut niveau dans la gestion du pays ou poursuit-il simplement son étrange trajectoire politique ponctuée, depuis 30 ans, par d’incessants va-et-vient entre la majorité et l’opposition ? ». On se souvient qu’en août 2019, à peine trois mois après avoir été démissionné, le président du PDG s’était affiché tout sourire auprès de l’opposant Jean Ping, pas encore à ce moment-là en perte totale de vitesse.
Pour d’autres, la perte de son poste de vice-président ne serait pas l’unique source de frustration de Pierre Claver Maganga-Moussavou. La sortie, la semaine dernière, de son fils, qui occupait depuis 2018 le portefeuille de l’Agriculture, aurait fait office d’électrochoc. « Il n’y a pas de hasard de calendrier. Moins d’une semaine après le départ de Biendi (Maganga-Moussavou) du gouvernement, son père se déclare candidat », fait observer un ministre chevronné.
Pour l’opposition (Mangaga-Moussavou se classant, à cette heure en tout cas, sur cette partie de l’échiquier), l’annonce d’une énième candidature contribue à émietter un camp où les prétendants à l’investiture suprême sont légions : de Jean Ping à Alexandre Barro Chambrier, en passant par Charles Mba et Paul-Marie Gondjout, sans compter Mike Joktane où certains des membres du collectif d’Appel à agir dont les dents rayent le parquet.